La SABIX
Bulletins déja publiés
Biographies polytechniciennes
 

Charles CAGNIARD DE LA TOUR (1777-1859)

Ce texte a été publié dans le Livre du Centenaire de l'Ecole polytechnique, 1897.

Si l'on peut appliquer aux hommes ce qu'on a dit des peuples, Cagniard, baron de La Tour, dut être heureux, car il n'a guère d'histoire, du moins en dehors de celle de ses travaux.

Tout ce qu'on peut dire de l'homme, c'est que, né à Paris, le 31 mai 1777, il fit partie en 1794 de la première promotion de l'Ecole Polytechnique, et qu'il sortit en 1797 dans le corps des Ingénieurs-Géographes. Plus tard il fut nommé auditeur au Conseil d'Etat, et en 1850, à 73 ans, membre de l'Académie des Sciences; il mourut en 1859.

Quant au savant, c'était un véritable inventeur, qui eut beaucoup d'idées originales en Mécanique, en Chimie et en Physique.

En Mécanique, on lui doit : une application de la vis d'Archimède pour faire barboter des gaz dans des liquides et les purifier; une pompe, où la vapeur d'eau était employée à faire le vide et à élever de l'eau; une pompe à tige filiforme pour diminuer beaucoup les frottements; un peson chronométrique pour mesurer les effets dynamiques des machines en mouvement; des recherches originales sur le mécanisme du vol des oiseaux.

En Chimie, il a signalé le premier l'endosmose de l'air et de l'hydrogène à travers le caoutchouc; il tenta des synthèses hardies comme celles du feldspath et du marbre à l'aide d'actions lentes, et celle du diamant en cherchant à oxyder le charbon en présence de la silice; enfin, il effectua sur les causes propres à produire la fermentation alcoolique des recherches qui ne sont pas sans valeur.

En Physique, on peut citer de lui : des études intéressantes sur le mécanisme du larynx considéré comme un instrument à anches, et sur la pression de l'air dans la trachée quand on parle et quand on joue d'un instrument à anches ; un pyromètre acoustique destiné à ramener la mesure des températures à l'appréciation de sons; des recherches sur les divers modes de vibration des liquides, et des expériences classiques sur la contraction transversale des verges étirées.

Mais son nom restera attaché à deux découvertes importantes : la première, par ordre de date, est l'instrument si connu sous le nom de sirène, inventé, en 1819, de la façon la plus simple et la plus originale, et qui a fourni aux physiciens et aux constructeurs d'instruments une méthode excellente d'évaluation numérique des sons, précieuse surtout quand on ne peut employer la méthode graphique et quand on veut se servir des battements. La seconde découverte date de 1822. Cagniard de Latour tenta le premier de faire volatiliser en vase clos, dans un espace deux à quatre fois plus grand que le volume du liquide, de l'éther, de l'alcool et de l'eau : il y réussit à une température suffisamment élevée. C'était une expérience capitale : c'est aujourd'hui l'une des bases expérimentales de la théorie des gaz; personne alors n'en vit l'importance, pas plus que l'auteur lui-même, mais il n'en a pas moins l'honneur de l'avoir exécutée.

E. Mercadier.