La SABIX
Bulletins déja publiés
Sommaire du bulletin 37
 

AMPÈRE AU MUSÉE DE L'ÉLECTRICITÉ
par Michel Siméon, conservateur.

Deux des quatorze salles de la maison d'Ampère à Poleymieux sont consacrées à la présentation des expériences fondamentales de l'électromagnétisme, action d'un courant électrique sur un aimant, et de l'électrodynamique, action d'un courant sur un autre courant.

Les visiteurs déclenchent eux-mêmes les dites expérience en pressant manipulateurs ou boutons. Les plans furent conçus en 1930 par le professeur Rigollot de la Faculté des sciences de Lyon. Une installation plus récente, branchée sur le secteur peut fournir sous une tension continue de 8 volts, une intensité atteignant parfois une centaine d'ampères. On comprend les difficultés rencontrées par les expérimentateurs du début du XIXe siècle lorsqu'ils utilisaient les piles zinc-cuivre-eau acidulée de première génération qui s'affaiblissaient rapidement même lorsqu'elles étaient de grande taille.

Dès l'entrée dans la première salle, un texte, sur un panneau, rappelle que le Congrès international des électriciens de Paris en 1881 a choisi le nom d'Ampère pour désigner l'unité d'intensité de courant électrique. A l'époque, la définition est la suivante : « on appelle ampère le courant produit par un volt dans un ohm ». De nouvelles et savantes définitions furent données par la suite (2 avril 1919 puis 1er janvier 1948).

Dans une première vitrine, on met en évidence les lignes de force de champs magnétiques. Des plaques de verre posées sur des aimants ont été saupoudrées de limaille de fer.


Expérience d'Oersted
Quand on place un courant dans le voisinage d'une aiguille aimantée, le pôle nord A de celle-ci se déplace vers la gauche du courant
Ampère a donné une règle très simple, pour préciser le sens des lignes de force qui nous occupent.
Il suppose un observateur placédans le courant de telle sorte que le courant lui entre par les pieds et lui sorte par la tête. L'observateur s'oriente, en outre, de façon à regarder le pôle nord de l'aiguille sur laquelle le courant exerce son action.
La gauche de cet observateur est alors ce que, pour abréger, nous appelons la gauche du courant.

Une seconde vitrine reproduit l'expérience d'Oersted de 1820 : au voisinage d'un conducteur métallique parcouru par le courant électrique, l'aiguille d'une boussole est déviée et tend à prendre une position perpendiculaire au conducteur. Comme le fit Ampère, il est possible de constater que le sens de rotation de l'aiguille est fonction de sa position (au dessous ou au dessus du fil) et du sens du courant, «c'est constamment à gauche que dévie l'extrémité de l'aiguille qui se dirige vers le Nord » (sachant que le fil conducteur est tendu au dessus de l'aiguille aimantée en direction du méridien magnétique et que le pôle + de la pile est branché sur l'extrémité sud du fil conducteur). L'expérience réciproque est réalisée en utilisant un barreau d'acier aimanté fixe. L'élément mobile est alors un cadre rectangulaire de fil conducteur suspendu au dessus et dans le même axe.

L'électrodynamique, découverte fondamentale d'Ampère est présentée au moyen de deux gros fils métalliques plies en forme de portiques. L'un est fixe, l'autre posé dans la partie supérieure du premier et en son centre sur un pivot isolé électriquement, est mobile. Il est possible de faire la constatation suivante :

Les champs magnétiques produits autour de fils conducteurs sont mis en évidence dans trois vitrines au moyen de petites boussoles ? Leurs aiguilles s'orientent tangentiellement aux lignes de force, dessinées sur des plaques de verre. A cette occasion apparaît le « solénoïde » imaginé par Ampère, ancêtre des multiples bobinages qui peuplent nos appareils électriques.

Dans la salle suivante, un solénoïde, enroulé en spirale comme un ressort, suspendu horizontalement, parcouru par un courant continu, oriente son axe en direction nord-sud comme une aiguille de boussole. Cette expérience à laquelle Ampère attachait une grande importance prouve « l'analogie de l'action du globe terrestre pour diriger les courants mobiles » et « les aiguilles aimantées ».

Dans l'expérience du solénoïde oscillant, l'extrémité supérieure d'un ressort est suspendue à une potence, la partie inférieure trempe dans une coupe remplie de mercure. Lorsqu'on envoie le courant dans le ressort, les spires soumises aux forces d'attraction des courants parallèles et de même sens qui les parcourent, se rapprochent les unes des autres et l'ensemble se soulève, jusqu'à interrompre le contact électrique dans le mercure. L'attraction mutuelle des spires cesse alors et le ressort se détend, ce qui rétablit le contact et la circulation du courant, provoquant la répétition du phénomène.

Dans la vitrine suivante, une maquette présente le télégraphe électrique imaginé et décrit par Ampère en 1820 : « On pourrait au moyen d'autant de fils conducteurs qu'il y a de lettres dans l'alphabet et en plaçant chaque lettre sur une aiguille (aimantée) différente, établir à l'aide d'une pile placée loin des aiguilles et que l'on ferait communiquer alternativement par ses deux extrémités à celle de chaque conducteur, former une sorte de télégraphe propre à écrire tous les détails qu'on voudrait transmettre à travers quelque obstacle que ce fût. En établissant sur la pile un clavier dont les touches porteraient les mêmes lettres et établiraient la communication par leur abaissement, ce moyen de correspondance pourrait avoir lieu avec assez de facilité et n'exigerait que le temps nécessaire pour toucher d'un côté et lire de l'autre chaque lettre. » A l'époque, l'idée ne fut pas retenue car elle posait de nombreux problèmes dont celui de la fabrication de câbles isolés à 26 conducteurs. Il fallut attendre encore près de vingt cinq ans de recherches et d'évolution des idées et de l'industrie pour voir se développer les premiers réseaux de télégraphes électriques. La maquette simplifiée, présentée ici, construite en 1930, transmet à faible distance les six lettres formant le nom d'Ampère.

Autre découverte, l'électro-aimant, dû aux recherches communes d'Arago et d'Ampère. Arago observe le premier que le fer s'aimante au voisinage d'un fil parcouru par un courant électrique. Ampère imagine de placer un noyau de fer à l'intérieur d'un fil conducteur roulé en hélice. La première bobine présentée ici, équipée dans son axe d'un barreau de fer doux attire ou relâche à volonté la limaille de fer. La seconde bobine peut également, à volonté, soulever ou laisser tomber la barre de fer coulissant au niveau de son axe. En retombant lourdement, cette barre préfigure certains marteaux pilons qui virent le jour par la suite. A partir de 1844 et pendant plus de quarante ans, avant l'avènement de l'électricité industrielle, le télégraphe Morse sera la principale application pratique des phénomènes électriques.

Trois expériences annonçant les moteurs électriques rotatifs terminent la série. D'abord la « roue plongeante de Monsieur Barlow », physicien anglais. Un disque métallique léger, mobile autour d'un axe perpendiculaire horizontal est placé entre les branches d'un aimant en fer à cheval. Son périmètre dentelé trempe dans une petite cuve contenant du mercure. Lorsqu'un courant est établi entre l'axe et le mercure, les champs magnétiques en présence animent le disque d'un mouvement continu de rotation.


La roue de Barlow (1822) : Peter Barlow, professeur à l'Académie militaire de Woolwich a construit le premier moteur électrique à rotation continue : une roue dentée est parcourue par le courant d'une pile qui entre par l'axe et ressort par les dents de la roue qui plongent dans une gouttière remplie de mercure. La roue est placée dans l'entrefer d'un aimant qui repousse le filet de courant passant par une dent, la fait sortir du mercure, agit de même sur la dent suivante, etc.

L'expérience suivante, imaginée par Faraday en 1821, montre la révolution d'un courant (parcourant ici une spire circulaire de cuivre, rigide et mobile), autour d'un aimant. Enfin, on trouve l'expérience de l'aimant mobile, imaginée par Ampère, où le conducteur mobile est l'aimant lui-même qui soumet les éléments de courant qui le parcourent à des forces qui le font tourner autour de son axe. Dans le montage présenté, un barreau aimanté est placé verticalement entre deux pointeaux. Le courant électrique arrive par l'extrémité supérieure de l'aimant et sa sortie se fait au moyen d'un anneau de mercure à mi distance des extrémités du barreau.

Nous découvrons également dans la même salle une « Table d'Ampère », cet « appareil électrodynamique » décrit par le savant dans une brochure de vingt cinq pages en 1822. Il utilisait une telle construction pour présenter commodément de nombreuses expériences d'électricité pendant ses cours au Collège de France. Elle y est toujours conservée. L'ingénieur Pixii à Paris en livra à diverses sociétés savantes en Europe. La table présentée est la copie fidèle de celle qui est exposée au Deutsches Museum de Munich. Elle a été construite en 1947 à l'initiative du colonel Hernand Behn, généreux donateur américain, qui, principal actionnaire d'A.T.T. avec son frère Sosthène, contribua avec lui, pour l'essentiel au rachat de la maison d'Ampère en 1928. Dans une vitrine voisine, sont exposés divers appareils anciens (spires de formes diverses très semblables à celles imaginées par Ampère). Ce précieux matériel provient du cabinet de physique du savant genevois Auguste De La Rive, correspondant et ami d'Ampère. Il a été donné par l'Université de Genève au moment de la fondation du Musée Ampère.

Deux salles exposent ensuite des gravures, des manuscrits ou des fac-similé de documents relatifs au savant et à sa famille. Les autres salles du Musée retracent l'histoire de l'électricité jusqu'à l'époque contemporaine. Citons tout particulièrement dans la salle présentant l'induction, la « machine de Pixii », premier alternateur, transformé en première dynamo par le dispositif imaginé par Ampère en 1832 pour obtenir un courant redressé. [Au sujet de la notoriété de la machine de Pixii, voir la biographie de Paul Gustave Froment (1815-1864 ; X 1835) ].


La machine de Pixii : en 1832, Nicolas Pixii construit la première machine d'induction en application de la découverte publiée par Faraday l'année précédente: un aimant en fer à cheval tourne devant deux bobines aux bornes desquelles on recueille un courant alternatif. Ampère transforme ce premier alternateur en «magnéto» par adjonction de la «bascule d'Ampère», premier dispositif redresseur mécanique.


Plan d'accès au Musée Ampère, route d'Ampère à Poleymieux au Mont d'Or (utilisant Google Maps API)